Viñales, fin janvier 2017
Joli petit village fraichement rénové pour le tourisme, en pleine campagne, au pied des mogotes, ces collines calcaires striées de falaises. Les maisons colorées se succèdent avec leur avant-toit soutenu par deux colonnes, deux rocking-chairs sur chaque terrasse. Sur la route, bus, taxis, scooters électriques, vélos, charrettes tirées par des bœufs, chevaux montés, poules et piétons se partagent la chaussée. La place de l’église est le lieu de rendez-vous pour tous, Cubains et voyageurs : il y a le wi-fi*, le terminal des bus, les agences, la musique le soir, des spectacles culturels locaux. Les filles se sont beaucoup amusées ici, à courir après un petit cubain à vélo, à danser, à s’inventer des histoires sur les marches avec leur deux copines, Elena et Lisa, les filles d’une famille française.
* A Cuba, en 2017, l’accès à Internet est possible soit en cybercafé, soit par les bornes wi-fi publiques (depuis fin 2015) qui se trouvent en majorité dans les parcs, les places ou dans les hôtels. Les Cubains n’ont pas Internet à la maison. Pour se connecter, il faut auparavant acheter une carte numérotée chez Etecsa, le France Telecom local : il vous faudra faire la queue et ne pas oublier le passeport car chaque carte vendue est enregistrée nominativement. Beaucoup de traçabilité dans ce pays !
L’activité phare à Viñales, est la balade à cheval. Pour chacune de nos deux promenades, nous avons loué deux caballos : un par couple adulte-enfant. Quel bonheur de pouvoir profiter du paysage et de l’activité humaine des champs. Pour les enfants, c’est magique : au bout de cinq heures, elles ne voulaient toujours pas s’arrêter ! Toute la famille y trouve son compte : les enfants sont accaparés par le contact avec l’animal et les adultes par l’environnement. Les parcours proposent généralement la visite d’une ferme de tabac à cigare et une autre de café, petites haltes culturelles intéressantes.
Certes, ces balades comme tout à Viñales sont très formatées pour le tourisme, mais j’ai eu l’impression que chaque habitant parvenait à améliorer son quotidien grâce à ce nouveau commerce. Dans certains pays que nous avons parcourus, le tourisme ne profite qu’à une faible partie de la population et les écarts de richesse se creusent ; je n’ai pas observé cela à Viñales. J’ai entendu des Occidentaux déplorer l’aspect commercial de ce village, mais il faut relativiser, on est bien loin des hôtels en all inclusive de Varadero ! Ici, on se promène parmi dans les champs où les agriculteurs labourent la terre à la charrue tirée par des bœufs, cueillent le tabac à la main et l’accrochent sur les séchoirs feuille après feuille, les animaux sont dehors, souvent sans parc, cabris et veaux naissent sous nos yeux, les poussins suivent leur mère-poule, les coqs chantent à tue-tête.
À la plage de Cayo Jutias, à 2h de Vinales :
En France, une grande partie du monde du travail se passe dans les bureaux et via Internet. Combien de fois me suis-je retrouvée à demander des précisions sur un métier à l’intitulé opaque : « mais que fais-tu exactement chaque jour ?! ». A Cuba, mais surtout à Viñales, les enfants peuvent voir et comprendre ce que fait une personne, quels outils elle utilise, décortiquer le processus, admirer un savoir-faire, observer le sillon laissé par le soc de la charrue. Il n’y a pas de bruit mécanique (ah si, les voitures !), très peu de bâtiments pour cacher un système industriel et gâcher le paysage, pas de pesticides…
Allongés dans un hamac à l’écart du village, nous respirons et goutons la saveur de la lenteur du temps, bercés par le chant des oiseaux, le son des sabots des chevaux, avec au loin les notes d’un groupe de musiciens. Enfin, nous sommes en harmonie avec le rythme naturel de nos filles, constamment plongées dans l’instant présent…