Nous roulons, elles jouent.
Nous nous arrêtons, elles jouent.
Nous nous promenons, elles jouent.
Elles travaillent, elles jouent.
Elles se brossent les dents, elles jouent.
Elles vivent, elles jouent !… ou elles dessinent.
Tous ceux qui les connaissent ont pu remarquer la complicité qu’il y a entre elles et la continuité qu’il y a dans leurs jeux. Leurs histoires se poursuivent, se ramifient, s’étoffent au fil de ce qui remplit leur vie.
Lors d’un voyage au Maroc il y a deux ans, un palmier était devenu un village où chaque personnage (des coquillages en l’occurrence) avait sa maison dans une écaille. En Corse, leurs protagonistes (des fourmis cette fois-ci) vivaient dans un village de « fourmilières » construites en épines de pin et décorées par leurs soins avec des fleurs. Dans les bois derrière notre maison en France, le village était imaginé à partir des racines d’un grand épicéa déraciné. Dans leur salle de jeux, elles utilisaient les Kapla ; chez mes parents on peut trouver des figurines ou autres objets attachés dans chaque arbre ; chez mes beaux-parents elles utilisent les pierres apparentes du mur…
Souvenirs du Maroc (oct 2014)
Pendant les trois premières semaines du voyage, elles n’ont pas sorti les figurines : « on joue avec nous-mêmes » dit Eléa. Elles incarnent alors des chevaux, des lions, ou encore des fées, vivant des histoires de tous les jours… mais édulcorées à leur façon !
Puis sont arrivés deux magnifiques chevaux aperçus dans une vitrine au Portugal… Dès lors, tout le panier de figurines a été de sortie. Elles ne les ont jamais rangées une semaine durant ! Quelle imagination : un pupitre de fée s’est vu attribuer le rôle de palefrenier prénommé Jean-Louis, le cheval ayant les pattes les plus larges était Lulu le cheval de trait, un bout de ficelle et une branche sèche deviennent une charrette, dans un rocher elles voient un abreuvoir et des couchettes pour tout ce petit monde.
Au moment où j’écris ces lignes, les filles sont côté de moi : Eléa est un lion qui est en train de réaliser un documentaire sur la formation des coraux pour ensuite fabriquer une œuvre d’art en corail pour décorer son repaire de lion. Luna s’intègre dans cette histoire en posant quelques questions à sa sœur pour bien entrer dans le même imaginaire, puis propose un personnage adapté à ce nouvel épisode.
Sous leur aspect léger, ces jeux leur permettent de grandir et d’apprendre. Elles passent une grande partie de leur temps à se mettre d’accord sur le fil d’une histoire, à proposer une idée à l’autre sans pour autant l’imposer, à tenir compte des spécificités des personnages inventés pour que tout ce petit monde vive en harmonie. Elles réinvestissent du vocabulaire, elles emploient des tournures de phrases dignes d’un conte. Elles tiennent compte de ce qu’on a pu lire ou observer sur un sujet, elles font des liens entre les choses et ce qui aurait pu sembler un savoir isolé reprend sa place dans un tout, dans la vie. Elles ajustent leur regard sur les choses et sur les événements vécus auparavant, l’une ou l’autre venant justifier la plausibilité ou non d’un fait nouveau dans leur histoire. Cela leur permet également de questionner leurs savoirs : elles sont des lions et un tigre vient faire son apparition, mais « Maman, est-ce qu’il y a des tigres en Afrique ? », « Heu, je crois que non, mais on va vérifier ! ».
Nous avons la chance de pouvoir leur offrir un temps conséquent de jeux libres au quotidien, même si elles sont surprises parfois que les journées soient aussi courtes…
Luna me dit : « Je ne veux pas grandir, je veux rester à 5 ans 1/2 pour pouvoir jouer toute ma vie ! ».
Ne t’inquiète pas mon trésor, personne ne t’interdira de jouer, continue à grandir avec le même enthousiasme. Et puis, des tas de métiers existent pour transformer ce flux d’énergie en profession-passion!
Oh la la, tombée la par hasard, ça me rappelle tellement de souvenirs ! Mes filles ont joué, joué, joué, avec des figurines ou sans, mais pendant des heures, des jours, à table, en marchant…Elles sont grandes maintenant, mais de toutes nos années en IEF c’est ce que je retiens. Quand je doute de la justesse ce qu’on leur a donné c’est ce qui me revient : toutes ces années de jeu, de mondes inventées qu’on leur a permis (ou pas enlevé plutôt). Et elles aussi. Ca leur a appris tellement, et donné tellement de bonheur que…je ne vois même pas comment on peut se construire solidement sans ça maintenant.
J’aimeJ’aime
Super, ça fait très plaisir d’avoir le retour positif d’une famille IEF qui a du recul !
J’aimeJ’aime